samedi 31 mars 2012

km 10 - Dernier épisode de la série « Tintin au Congo » : Tintin et les élections ?

Didier de Lannoy
alias Vieux Zumbel
(anciennement – et pour toujours - Vié ba Diamba... mais j’ai préféré changer de perruque, depuis que je suis revenu à Kinshasa, pour qu’on ne me reconnaisse pas derekitima ?)
Kamundele na makayabo... (cookies ya Kin)
Série 12011
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Dernier épisode de la série « Tintin au Congo » : Tintin et les élections ?
Vieux Zumbel s'interroge : Tintin a-t-il changé de look, de Dieu, d'âge, de style ou de business ? Habite-t-il encore Bruxelles ? A-t-il transporté ses bureaux à Paris, Londres, Berlin, Moscou ou Washington ? Demeure-t-il à présent dans les beaux quartiers de New Dehli, Pretoria, Luanda, Kigali, Brazzaville, Brasilia, Beyrouth, Tokyo ou Beijing ? S'est-il mis au service de l'Otan ou de l'Union européenne ? Est-il toujours à même de sévir au Congo ? Est-il devenu un agent de la Banque Mondiale, du FMI, de Wall Street ou des bourses de Shanghai ou de Shenzhen ?
 

(5 décembre 2011, à la veille de l'annonce officielle, par le président de la Commission Electorale Nationale Indépendante CENI, des "résultats provisoires" de la Présidentielle 2011, en RDC)

1ère partie : Tintin au Congo... et le « contexte de la colonisation », comme ils disent !

 
Tintin, on en a beaucoup entendu parler, ces dernières années, en Belgique et au Congo...
Le mérite en revient, particulièrement, à Bienvenu Mbutu Mondondo qui, depuis 2007, a engagé une action judiciaire à l'encontre de l'album « Tintin au Congo », pour « racisme »


Les défenseurs de l'album invoquent un « contexte de colonisation »
Vieux Zumbel s'improvise
- Avec le concours particulièrement (vous allez rire !) de Wikipedia !
historien... et s'interroge : Quel était donc ce contexte ?

Ce contexte était, tout d'abord, celui d'une droite catholique conservatrice, tentée le fascisme.
Une première version de « Tintin au Congo », en noir et blanc, a, en effet, été publiée, en feuilleton, du 5 juin 1930 au 18 juin 1931, dans « Le petit vingtième », supplément pour la
jeunesse du journal belge « Le vingtième siècle ». Le Vingtième siècle était un journal conservateur, d'obédience catholique, dirigé, de 1924 à 1933, par un
- Un croisé !
prêtre diocésain, désigné à ce poste par le cardinal Mercier, l'abbé Norbert Wallez... réputé antisémite et grand admirateur de Mussolini1. En 1927, alors qu'il était directeur du Vingtième siècle, Norbert Wallez a embauché Georges Remi et lui a confié (après un certain temps passé au service des abonnements) la direction du supplément « Le petit vingtième » dont le premier numéro a paru en novembre 1928. Et c'est Norbert Wallez qui, rapporte-t-on, aurait suggéré et inspiré, voire « commandé », à Georges Remi (devenu alors RG ou Hergé) l'idée d'un personnage de jeune « reporter » auquel les jeunes catholiques européens pourraient s'identifier et qu'on pourrait envoyer un peu partout dans le monde, porteur de certaines valeurs estimées « positives » par ses maîtres à penser (dénonciation des « crimes du communisme », magnification de « l'oeuvre colonisatrice de la Belgique», etc).

Ce contexte était aussi celui de la sortie de crise de 1929... et du souci d'intéresser

 - Pour résoudre les problèmes de chômage en Belgique et donner un nouvel élan à l'exploitation des ressources du Congo...
les jeunes belges à faire carrière au « Congo belge » (en tant que colons, missionnaires, sous-officiers ou officiers de la Force publique, agents de sociétés ou agents de la colonie). Il pourrait être intéressant, à ce sujet, de rechercher quels étaient les intérêts politiques, financiers, industriels et miniers que servaient, à cette époque, le journal « Le vingtième siècle »... Et de s'interroger, notamment, sur le positionnement des propriétaires, actionnaires et/ou publicitaires de ce journal par rapport à la famille royale, à la Société générale de Belgique, au ministère des colonies, à l'Union minière et aux évêques de Belgique...

Tel était le « contexte » de la parution de « Tintin au Congo » dans se version originale2
, intitulée Les Aventures de Tintin, reporter du "Petit Vingtième" au Congo.

Compte tenu de ce contexte très particulier, Vieux Zumbel considère que « Tintin au Congo » n'était pas le produit d'une « ignorance » ou le simple « reflet » d'une époque mais, tout au contraire, une entreprise concertée de désinformation et de mystification, un instrument

 - Manipulé par des personnes qui étaient « bien au courant » de ce qu'elles dissimulaient ... et qui savaient parfaitement ce qu'elles faisaient et quels intérêts elles avaient à servir...
conscient de propagande, visant non seulement à justifier l'exploitation coloniale passée (occultation des violations des droits de la personne humaine, banalisation d'un bagne collectif... présenté comme une espèce de « paradis » de bienveillance paternaliste au bénéfice d'une population "indigénisée") mais aussi à en poursuivre activement le « développement » en incitant les jeunes Belges à s'engager sous le « drapeau » de la colonie

Vieux Zumbel veut cependant rester
- Oh ! Vraiment ? Qui va croire ça ?
« positif » ! ... et, à ce titre, propose de retenir de « Tintin au Congo »...
d'une part, qu'il témoigne, bien involontairement certes, d'une résistance à l'occupation coloniale, symbolisée notamment par le sorcier Muganga (un « diela » portant sur la tête une marmite de voyance lui tenant lieu de couvre-chef ?) et la confrérie des Aniotas, ces hommes-léopards qui constituaient une « armée secrète » s'en prenant notamment aux collaborateurs de l'occupant étranger...
et, d'autre part, qu'il témoigne également de la « guerre des minerais précieux » qui, dès cette époque, opposaient au Congo des intérêts économiques occidentaux divergents (belges et américains, etc)...

Vieux Zumbel relève enfin que l'album « Tintin au Congo », tel que « revu, corrigé et redessiné » en 1946, remplace une leçon de « patriotisme belgo-belge » (peu vendable sur le marché mondial) par une « leçon de mathématiques »... dont Vieux Zumbel se plait à croire

- Les oreilles peuvent grandir et dépasser la tête ?

qu'elle a pu inspirer tel ou tel lointain parent de Celio Matemona, alias « Celio Mathematik », principal personnage de « Mathématiques congolaises », le célèbre roman de In Koli Jean Bofane (Actes Sud, 2008)
 


2ème partie : Tintin et les élections ?
 
Tintin, depuis toujours, on nous le sert
-
Comme Martine (à la ferme, à la mer, au cirque, à la foire, au bord de la rivière, à l'école, dans la forêt, en montgolfière, etc) !
à tous les repas et assaisonné

- Cela dépend, évidemment, du cuisinier !

de différentes manières...

C'est ainsi qu'on a connu :
Tintin à la recherche des sources du Nil
Tintin et la récolte de l'ivoire et du caoutchouc... et les villages attaqués et les femmes capturées et gardées en otage par les soldats... jusqu'à ce que le quota de caoutchouc

 - L'impôt en nature, quoi !
exigé par l'officier soit fourni par la communauté... à laquelle les femmes étaient alors « revendues »

- Chaque femme valant, au moins, deux chèvres !

à leurs « propriétaires »...
Tintin et la « pacification » des guérillas Tshokwe, Yaka, Budja, etc
Tintin et la répression des soulèvements populaires : ainsi la mutinerie du sergent Kandolo ayant, au sein de la Force publique, pris la tête d'un mouvement de rébellion contre le commandant Mathieu Pelzer... lequel avait fait exécuter sa propre « ménagère » accusée de l'avoir « trompé » avec

 - Un Noir ?
un autre homme... et n'hésitait pas à faire donner cent-vingt coups de chicote aux soldats 

 - Eux-même capturés ou réquisitionnés... ou, plus rarement (ceux qui préféraient « être du côté des chasseurs plutôt que du gibier », on peut certes les comprendre...), engagés volontaires!
qu'il estimait devoir« punir »... ainsi également la révolte du chef Nzansu qui s'opposa aux exigences « esclavagistes » du chef de poste Eugène Rommel chargé de réquisitionner

 - Par milliers !
des porteurs pour la route caravanière allant de Matadi au Stanley Pool, etc
Tintin et les diamants du Kasaï
Tintin et les mines de cuivre et d'uranium... et la première bombe atomique
Tintin et les mines d'or de Kilo-Moto
Tintin et les plantations de thé et de café
Tintin et la campagne cotonnière
Tintin et l'effort de guerre
Tintin au Memling, au Yacht club, au Golf, à la plage de Moanda ou à l'assaut du mont Ruwenzori...

En 1960, on croyait s'en être débarrassé, on lui avait même

 - Bima ! Buiten ! Dehors ! Longwa ! Fuera ! Raus ! Weg met Kuifje ! Tintin go home !
délivré un ordre de quitter le territoire... mais il était bien vite revenu
Tintin au Katanga
Tintin et les mercenaires
Tintin et la « neutralisation » suivie de l'assassinat du premier ministre Patrice-Emery Lumumba
Tintin et la répression de la rébellion
Tintin et l'arrivée au pouvoir de l'ancien président Joseph-Désiré Mobutu
Tintin et l'assistance technique, bientôt remplacée par la coopération au développement
Tintin, le barrage d'Inga... et la très curieuse histoire d'un important marché "compensatoire"
- Après la "zaïrianisation", eh !

passé avec les ACEC... et la livraison par cette entreprise de Charleroi de quatre turbines comportant de graves défauts de conception

Tintin et le devoir d'ingérence humanitaire
Tintin et le coltan et la cassitérite
Tintin et le gaz et le pétrole
Tintin et l'eau et la forêt
Tintin et la possibilité de mise en exploitation de nouveaux gisement aurifères dans la région de Mangbwalu
Tintin et le FMI et l'initiative PPTE
Tintin et les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu (Tintin réhabilitant le parc des Virunga et Tintin se portant au secours des femmes violées)...

Tintin n'a jamais cessé d'être là... et on en arrivait même, parfois, à l"évoquer
- Tango ya ba Noko !
avec nostalgie...

On en avait presque oublié les anciens « tubes » de l'époque coloniale ?

Tintin et les passeports de mutation et les travaux d'ordre éducatif et les cultures obligatoires et le cantonnage manuel et l'impôt

 - C'est eux qui nous doivent ! Avec tout le bien qu'on leur a fait (on leur a donné la bible, on leur a fourni du travail, on leur a appris la discipline et la morale, on les a encartés et numérotés, on leur a apporté la bière et les cantiques de Noël, on a confisqué leurs "fétiches" sataniques et on les a autorisés à se prosterner devant les statues de nos saints, on a réglementé - en les interdisant - l'usage de l'alcool dit « indigène » et la pratique des danses dites « obscènes », on leur a dispensé des soins collectifs et de type vétérinaire... pour maintenir en bon état de fonctionnement leur force de travail au service de la colonie) ! Et il faudrait les payer encore ! Avec tout ce qu'ils nous doivent ! A un « juste salaire », oh !
de capitation ?
Tintin et les Missions catholiques et l'Administration (et la « justice ») territoriale et la Force publique et

 - L'encadrement militaire (paroissial, administratif, « judiciaire », idéologique et répressif permettant à la colonie de s'assurer les services d'une main d'oeuvre captive... pour les plantations, la construction et l'entretien des routes, la production de cultures destinées à l'exportation, les "fazendas" des missions, les mines, les industries) de toute une population, voilà (de même que les bas salaires) une des principales clefs permettant d'expliquer le prétendu "miracle économique" colonial !
la chicote administrée (jusqu'en 1955) aux réfractaires ?

Et voilà que, d
epuis quelques jours, à nouveau, des rumeurs circulent...
Le service de Sms serait suspendu chez tous les opérateurs économiques congolais « pour préserver l'ordre public » et ce « jusqu'à nouvel ordre ?
La vente d'essence aux particuliers serait « surveillée » ? Le Grand Hôtel de Kinshasa refuserait du monde et serait
- Les Muras ? Des blindés ?

placé sous haute protection ? Plusieurs milliers de personnes auraient traversé le fleuve et gagné Brazzaville ?

Il se passe quelque chose ? Quelque chose se prépare ?
Vieux Zumbel, perplexe, s'interroge encore : Le Tintin du « Congo belge » se serait-il invité dans la campagne électorale du "Congo congolais" (Tintin lui-même... et toute sa descendance ou ses survivances, accointances et réincarnations diverses) ? Tintin serait-il devenu une pieuvre multinationale... avec de multiples ancrages locaux ? La série des « Tintin au Congo » se terminera-t-elle donc jamais ? Un nouvel album de
Tintin serait-il en préparation ? Un nouveau titre serait-il sur le point de sortir ?

Tintin et les élections ?

Toboyi yango !
Que Tintin cesse de venir au Congo !
Ici, au « Congo congolais » – et que cela soit dit clairement - tout le monde lui préfère
- Ekoyinda ?
- Eyinda kaka !
les héros de « Jeunes pour Jeunes »3: Apolosa, Kikwata, Mama Sakina, et Mose Konzo, Sinatra le justicier du quartier (s'opposant à Molok, le gladiateur4), Durango, le brigadier Mongala... !5
Tozongisa Tintin na Poto !
Et que vive le Congo congolais !



1 Ayant soutenu Léon Degrelle pendant l'occupation nazie, l'abbé Norbert Wallez a été, en 1947, condamné à quatre ans de prison pour faits de collaboration. Libéré, malade, en 1950, l'abbé Wallez a été recueilli par le couple Remi...
2 Devenu ensuite un album en couleur, « Tintin au Congo »... a encore - aussitôt après la guerre de 40/45 - été « revu, corrigé et redessiné » pour des raisons d'opportunité « idéologique »... et d'ordre mercantile : afin de développer les ventes de l'album dans d'autres pays que la seule petite Belgique.
3 La revue mythique des bills et des yankees, « Jeunes pour Jeunes » (rebaptisée ensuite « Kake »), a été créée et animée, dans les années 1968-1971, par Freddy Mulongo et Achille Ngoye. S'y firent connaître, notamment, les dessinateurs et auteurs Boyau Loyongo, Lepa Mabila Saye, Bernard Mayo, Djemba Djeïs et Sima Lukombo...

5 Et, depuis lors, tant d'autres personnages créés par de nouveaux
- Et talentueux !

auteurs dans lesquels les lecteurs du Congo trouvent plaisir à se reconnaître : Barly Baruti (et sa trilogie Eva K), Asimba Bathy (l'infatigable promoteur de la nouvelle BD congolaise : fondateur de Yaya en association avec Disco Magazine, créateur et animateur principal de la revue Kin Label), Hallain Paluku (et sa « femme sans visage », la voluptueuse Missy), Mfumu'Eto 1er, Jason Kibiswa, Trésor Tshibangu Tshamala (alias « Tetshim »), Fati Kabuika (dont un des héros, Andolo, parvient toujours à contrarier, avec talent, les plans machiavéliques de sinistres « voleurs de chiens »)...

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